Place du Marché
Historique
Si la cité médiévale était, en général, une création de marchands, il est logique qu’à Draguignan la place des marchands soit devenue le cœur de la ville et le centre des affaires, alors que le rocher seigneurial subissait une rapide désaffection. En dehors du XVIIIe et du début du XIXe siècle, où la place fut nommée » de la Municipalité « , » de la République », » Napoléon » et » Royale » successivement, celle-ci est restée la place du Marché, de nos jours comme au début du XIIIe siècle, époque où une activité commerciale croissante obligea de lui adjoindre un » marché neuf » (pl. R. Fréani).
Le rempart du XIIIe-XIVe siècle vint séparer l’église paroissiale de son cimetière. Des maisons (Nos impairs) vinrent se blottir contre la muraille, sur une bande de terrain initialement interdites (les » régales « ). L’origine des maisons était bourgeoise, mais l’utilisation des rez-de-chaussée résolument commerciale (boutiques, entrepôts…). La place était le lieu de rassemblement obligatoire des journaliers agricoles, qui se louaient là après la messe de l’aurore ( » les lougatiers « ). Elle était équipée d’une fontaine, qui servait à abreuver bêtes et gens et dans laquelle, à l’occasion, on plongeait des condamnés enfermés dans un sac (1337). On y trouvait aussi » la pierre du marché « , imposante table de pierre avec un ou des creux à mesurer le volume des denrées vendues. La place était un lieu de transactions, mais aussi d’enchères, d’exposition des saisies et le lieu par excellence des rencontres de la sociabilité ou des frictions. On s’y fusilla allègrement sous la fronde (1658).
Au début du XVIe siècle, la paroisse aliéna une partie du cimetière, plutôt malmené, qui occupait le bas de la place. Les maisons qui s’y élevèrent formaient un îlot fermant la place vers l’est. À la fin du XVIe siècle on planta des arbres pour y faire » une salle de verdure » où l’on pourrait danser à l’ombre. C’est une toute autre danse à laquelle étaient conviés les malheureux condamnés : attachés à un arbre ou exposés sur des tréteaux, ils portaient au cou la poule qu’ils avaient volée ou à l’épaule la marque du fer rouge (pratiqué jusqu’en 1832). Le gibet y fut érigé au XVIIe siècle. En 1672, la place ravit aux places Portaiguières et Porte-Romaine le privilège de recevoir la foire de la Sainte-Luce (14 décembre).
Les maisons fermant le bas de la place accueillent l’Hôtel de ville au milieu du XVIIIe siècle.
Ce n’est qu’après de nombreuses pétitions que les riverains obtinrent des trottoirs, mais ils durent fournir la pierre pour la bordure. En 1841, on y installa une fontaine ronde à chaque extrémité. Seule a survécu la colonne de celle du bas du Marché, portant le buste noirci du baron-préfet au dessus de la foule, des fruits et des légumes.
Source : Draguignan – Le Temps Retrouvé – Pierre Jean Aymard – Éd. Équinoxe
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